Interview de Marc, docteur en traitement du signal chez VEDECOM, qui rêve de permettre aux personnes âgées de conserver leur mobilité même si elles ne sont plus en capacité de conduire… Pour lui, le véhicule autonome n’est pas seulement un produit technique, c’est une conviction pour laquelle il travaille depuis plus de 12 ans ! Son angle d’attaque ? Aider le véhicule à garder le cap grâce à la détection des marquages routiers…

Traitement du signal : des manteaux neigeux aux marquages routiers
Passionné par la robotique depuis toujours, j’ai obtenu mon diplôme d’ingénieur à l’Université Technique de Belfort-Montbéliard (UTBM), où je me suis spécialisé en traitement du signal. Dès cette époque, je m’intéressais au véhicule autonome. Mes premières expériences professionnelles se sont pourtant tournées vers d’autres domaines : simulation de théâtres d’opérations dans le domaine militaire, ou encore modélisation du manteau neigeux en Suisse. Puis j’ai voulu travailler pour la sécurité routière et c’est à l’IFSTTAR, l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux, que j’ai commencé mes recherches sur la détection des marquages routiers afin de guider le véhicule. Lorsque VEDECOM, qui n’était alors que Mov’eo Tech, a lancé un appel à projets de thèses, j’ai présenté mon sujet : un mixte entre mes travaux sur la détection de marquage à l’IFSTTAR et le système multi-agents inspiré de mes recherches sur le manteau neigeux. Il a été retenu et j’ai été recruté chez VEDECOM.

Relocaliser le véhicule grâce à la détection des tirets de marquage
Aujourd’hui, ma mission principale est la relocalisation d’un véhicule sur la voie grâce à la détection d’une constellation de marquages routiers. En 2018, j’ai développé une première version de logiciel en ce sens. Une seconde version est en cours qui intègre des cartographies de détection 3D et de nouvelles sources d’information : une caméra à l’arrière du véhicule complète ainsi celle placée à l’avant. Elle nous permet de résoudre les problèmes de soleil rasant ou d’éblouissement dans les tunnels. Cela nécessite un gros travail de fusion de capteurs pour assurer leur calibrage précis : horodatage et enregistrement des données, synchronisation des capteurs, étude de leur fonctionnement pour les utiliser de manière optimale…

J’assure également la formation « Initiation au Véhicule Autonome » dans le cadre du programme Formation de l’Institut : je suis polyvalent en matière de véhicule autonome et il m’apparaissait comme une évidence de transmettre mes connaissances.

Adapter les routes au véhicule autonome : une condition sine qua none, sans coût additionnels
Mon grand défi actuellement, c’est de réussir à convaincre les décideurs de la nécessité d’adapter les routes au véhicule autonome. On ne demande pas grand-chose : seulement de légers changements, sans coûts additionnels. Par exemple, changer la configuration des marquages routiers : rapprocher les tirets au sol, changer la couleur des marquages en les faisant passer du blanc au vert afin d’éviter les artefacts de marquage que peuvent occasionner les ombres au sol. Ce faisant, on aura déjà résolu un des deux gros problèmes du véhicule autonome : la localisation centimétrique des véhicules. Techniquement, il restera à surmonter les difficultés de détection que représentent les ombres au sol, les fortes pluies… sans parler de la neige qui risque bien de nous faire repasser en mode manuel !

Constituer chez VEDECOM une équipe solide et soudée autour du véhicule autonome
VEDECOM a une place unique de centre de mutualisation de tous les acteurs français du véhicule autonome. C’est très motivant, tout comme la grande flexibilité qui y est offerte aux chercheurs. On se sent investis. Je fais partie des premiers arrivés chez VEDECOM, et ma raison d’être ici a toujours été d’essayer de créer une équipe solide et soudée autour du véhicule autonome. C’est un domaine où toutes les compétences sont très dépendantes les unes des autres et la notion d’équipe y est primordiale : si la détection d’obstacles ne fonctionne pas, la détection de marquage peut en pâtir…

Des projets motivants et prometteurs
Les démonstrations de recharge dynamique sans contact du projet européen FABRIC, réalisées avec tous nos partenaires, ont incontestablement été très motivantes : notre système était utilisé concrètement afin d’aider le véhicule à se localiser le plus précisément possible sur la bobine de recharge par induction intégrée à la route afin d’optimiser le couplage avec la bobine du véhicule au fur et à mesure qu’il avance. Et cela fonctionnait ! Nous allons poursuivre ce travail dans le cadre du projet européen INCIT-EV : cette fois-ci nous essaierons même de contrôler le volant pour automatiser le guidage du véhicule !

Autre moment fort : à la fin d’une présentation devant des partenaires, l’un d’entre eux m’a dit : « Au début, je ne croyais pas à ce que tu m’avais expliqué. Tu as persévéré malgré tout et finalement tu nous montres aujourd’hui quelque chose qui nous a convaincus. On continue l’an prochain, on fait une V2 et on aimerait que tu viennes l’intégrer dans nos véhicules. » La reconnaissance des industriels est vraiment encourageante !