Hyperlieux Mobiles : les activités mobiles au service de nouvelles formes d’urbanité

05 / 02 / 2020

L’événement « La Ville, nouveaux horizons », organisé par Le Point, a eu lieu vendredi 29 novembre 2019 à la Villa Massena à Nice. Objectif de la journée : réfléchir aux leviers et aux enjeux impliqués par les transformations nécessaires de nos espaces urbains. Comment constituer le terreau fertile à l’apparition d’un territoire équilibré, susceptible d’abriter des villes métissées, plurielles, attractives et écologiques ? Et comment dépasser les concepts parfois usés de « ville durable », ou encore de « smart city » ? Des intervenants prestigieux comme Jean Nouvel, Jean-Jacques Aillagon ou encore Antoine Picon, étaient invités à donner leur éclairage. Mireille Apel-Muller, Directrice de l’Institut pour la ville en mouvement (IVM), entité de VEDECOM, y présentait le concept d’hyperlieux mobiles, développé par l’IVM. Retour sur cette intervention, qui prend prétexte du véhicule autonome pour brosser de nouveaux horizons aux mobilités de demain.

« Par-delà le véhicule autonome : l’enjeu des hyperlieux mobiles »

C’est l’émergence d’un concept que Mireille Apel-Muller était venue présenter à l’événement « La ville, nouveaux horizons ». Celui d’hyperlieux mobiles, développé par l’IVM, institut qui a pour mission de réfléchir aux mobilités dans ses dimensions sociétales au-delà de l’unique question des transports : du point

de vue des usages et des pratiques sociales, des interactions avec l’aménagement et les espaces publics, de la gouvernance…  La notion d’hyperlieux mobiles L’IVM explore une troisième voie jusqu’à présent négligée : il invite à considérer la mobilité sous l’angle des activités et des services. Un domaine paradoxalement impensé, puisque les activités mobiles, d’ores et déjà omniprésentes, promettent de prendre de plus en plus de place dans nos modes de vie.

Le projet « Hyperlieux Mobiles » : observer la société pour innover

Afin de donner corps au concept, l’IVM et ses partenaires internationaux sont partis à la rencontre des activités mobiles existantes. Par activité mobile, il faut entendre toutes les activités dont la mobilité est le support. Celles-ci ne sont pas nouvelles : au contraire, elles semblent avoir toujours existé, du colporteur aux activités foraines en passant par les hôpitaux de guerre mobiles. Elles utilisent tous types de véhicules et concernent tous les secteurs. Au total, le projet « Hyperlieux Mobiles » a recensé plus de 600 activités mobiles… et fait un constat : loin de reléguer ces activités dans le passé, l’hyper-connectivité et la révolution numérique les conduisent à une diversification toujours plus grande. Avec des hybridations rendues possibles par les mutations conjointes du numérique (transport aisé de bases de données), du progrès technologique (production de sa propre énergie) et d’une pensée éco-systémique. Par l’apport d’activités et de services, l’hyperlieu mobile contribue à la construction de formes inattendues d’urbanité générées par de nouvelles interactions entre espaces, mobilités, connectivités et activité. C’est parfois le véhicule lui-même qui devient un vrai lieu mobile d’activité (c’est ainsi qu’à Buenos Aires et Paris, on fait la fête dans des bus) ; d’autres fois, c’est l’activité mobile qui fait lieu en fabriquant autour d’elle des formes d’urbanité éphémères : ainsi ce véhicule en Australie qui vient laver le linge des sans-abris et propose une projection de cinéma pendant que la machine tourne, devenant ainsi pour quelques heures cinéma de plein air…

Des acteurs nouveaux pour inventer la ville mobile de demain

Cette tendance n’est pas le fait de cas isolés : c’est une vague de fond portée par les plus grandes sociétés industrielles. C’est ainsi que Toyota a présenté au Salon de Las Vegas son projet de « Ville à la demande ». L’idée : la conception par le constructeur automobile d’un concept de véhicule autonome « châssis » (E-palette), susceptible d’abriter toutes formes d’activités, de l’hôpital au bureau mobile, en passant par l’épicerie, la pizzeria ou encore le Fab Lab.

C’est le cas également d’Ikea, champion du mobilier pour espaces contraints, qui imagine via son laboratoire d’innovation Space 10 des concepts d’objets mobiles et autonomes. On voit ainsi arriver des acteurs nouveaux dont l’ambition est de construire la ville de demain… mobile !

Enjeux et défis des hyperlieux mobiles pour la ville de demain

Cette redéfinition des lieux du quotidien par les véhicules porteurs d’une activité mobile est lourde d’enjeux et de défis. Défi pour les territoires, pour qui il s’agit de penser ces formes d’activité au service des métabolismes urbains, et comme des solutions pour apporter une haute qualité de service jusque dans les zones les plus isolées. Défi pour les aménageurs qui se doivent de prévoir de nouveaux espaces pour ce type d’aménités et de programmer des activités qui restent sous le contrôle de la puissance publique. Défi pour les designers : nos objets vont devoir changer, ainsi que les espaces pour les accueillir. Enjeu pour les politiques qui vont devoir gérer le licite et l’illicite, arbitrer les conflits d’usages entre activités mobiles et commerces fixes, contrôler la privatisation de l’espace public et la surexploitation des espaces. Enjeu économique : quels business models 3.0 allons-nous pouvoir inventer pour ces petites activités très agiles. Enfin, enjeu de société puisqu’il va nous falloir déterminer quelle part de notre espace-temps nous souhaitons consacrer à l’activité économique.

 

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