A la suite du séminaire « Acceptabilité du véhicule autonome », qui s’était tenu le 9 novembre 2018 au Ministère de la Transition Écologique et Solidaire, la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM) avait fait la demande à VEDECOM d’une monographie sur les enquêtes nationales ayant pour objet d’étude l’acceptabilité du véhicule autonome. Retour sur les principaux enseignements de ce document qui synthétise et analyse les résultats de 9 enquêtes d’opinion et 4 études scientifiques sur la façon dont le véhicule autonome est appréhendé en France.
Connaître et comprendre l’acceptabilité française actuelle du véhicule autonome
Rédigée par Marlène Bel, chercheure en psychologie sociale chez VEDECOM, et Stéphanie Coeugnet-Chevrier, Directrice du domaine « Nouvelles solutions de mobilité et énergies partagées » à l’Institut, la monographie « Acceptabilité du véhicule autonome » fait un état des lieux des enquêtes et études sur le sujet au niveau national. L’enjeu de ce travail de fond est d’améliorer la connaissance et la compréhension de l’acceptabilité française actuelle du véhicule autonome, pour constituer une base de réflexion qui alimente le bien commun. L’Institut VEDECOM a rendu sa copie lors du séminaire sur l’Acceptabilité du Véhicule Autonome, prévu et organisé par la Stratégie Nationale du Développement des Véhicules Autonomes le 25 mars 2019.
Au total, ce sont 8 500 Français qui ont été interrogés dans les enquêtes d’opinion étudiées, et 5 300 pour les études scientifiques. Objectif : cerner la perception que les Français ont de la voiture autonome de niveau 5, tant au niveau de sa sécurité, que de sa fiabilité, du plaisir procuré, de son confort, son coût, ou encore de la possibilité de tâches de vie à bord qu’elle permet. Les questions relatives au gain de temps et d’espace, à l’utilisation des données personnelles, à la place du superviseur ou encore à l’intégration du véhicule dans son environnement sont également envisagées. Les études concernent tant les véhicules de type personnel ou robot-taxi, que les navettes ou bus autonomes.
Le véhicule autonome : entre attrait et appréhension
Sécurité, confort, nouveaux usages… Les attraits du véhicule autonome, objet onirique s’il en est, sont nombreux. Mais c’est en tant que fantasme de liberté suprême qu’il se révèle le plus plébiscité. A l’indépendance et l’autonomie qu’offre l’automobile en général, il rajoute la promesse de plus de temps libre et de davantage de confort pendant les trajets. Un engagement qui ne laisse pas indifférent : 37% des Français seraient disposés à utiliser une voiture entièrement autonome car ils auraient « plus de temps libre » durant leurs trajets (IFOP, 2018). Pour 74% des Français, la voiture connectée est un moyen de gagner du temps (Observatoire Cetelem, 2016) ; et 64% des sondés estiment que c’est l’absence de limitation dans leur liberté de déplacement qui les ferait utiliser un véhicule sans conducteur (Débats citoyens, 2018). Selon une étude menée par VEDECOM en 2018, 85% des Français souhaiteraient enfin faire autre chose dans leur véhicule complètement autonome, plutôt que de conduire ou de superviser leur véhicule. La sécurité reste par ailleurs au cœur des attentes des usagers : pour 58% des sondés, l’usage des véhicules sans conducteur représenterait une amélioration de la vie quotidienne en termes de sécurité (Débats citoyens, 2018).
Cet espoir de liberté de déplacement sans limite est néanmoins tempéré par un certain nombre de craintes qui sont autant de freins à l’acceptabilité du véhicule autonome : pour 40% des sondés de l’enquête IFOP 2018, « les voitures autonomes sont un peu effrayantes ». « Le risque est trop élevé aujourd’hui d’un point de vue technique », affirment 53% des personnes interrogées dans le cadre de la même étude. En outre, les questions de cybersécurité, d’utilisation des données personnelles ou encore de responsabilité apparaissent comme autant de facteurs menaçants.
La confiance, clé de voûte de l’acceptabilité
Si les sentiments des Français sont partagés, un facteur d’acceptabilité déterminant se dessine peu à peu au fil des études : la confiance. Confiance dans la technologie, mais aussi dans les règles, les usages, les systèmes et services. Pour 53% des Français, « ne pas faire confiance au véhicule autonome pour prendre la bonne décision » est la principale raison pour laquelle ils ne seraient pas disposés à l’utiliser (Débats Citoyens, 2018). Les études permettent de montrer que les premiers usages du véhicule autonome améliorent néanmoins la confiance dans son objet. Un constat qui fait écho au concept TRUST, développé par Yann Leriche et Jean-Pierre Orfeuil dans leur récent ouvrage Piloter le véhicule autonome au service de la ville, coordonné par l’IVM-VEDECOM et porté par VEDECOM. TRUST (pour Technologies – Règles – Usages – Systèmes et Services – Territoires) est une méthodologie centrée sur la confiance, qui offre une garantie de rigueur en mettant en œuvre une démarche holistique et multi-critères permettant de saisir les conditions d’émergence de la mobilité autonome.
La monographie met en évidence deux autres points majeurs :
- L’acceptabilité des navettes autonomes est généralement supérieure à l’acceptabilité des voitures autonomes. Le changement de paradigme est en effet moins important dans le premier cas que dans le second, le passager d’un véhicule autonome devant passer progressivement de l’état de conducteur à celui de passager de son véhicule.
- Les Français ont une bonne acceptabilité des véhicules autonomes lorsque les différents niveaux d’automatisation sont pris en compte. Si seul le niveau 5 est considéré, ce qui est le cas dans les enquêtes d’opinion, alors l’acceptabilité des Français à l’égard du véhicule autonome est inférieure à la moyenne. Il apparaît par ailleurs des disparités d’acceptabilité du véhicule autonome suivant le lieu d’habitation des individus, les habitants des métropoles et des grandes villes françaises présentant une acceptabilité nettement supérieure aux habitants des zones peu denses. 71% des Français vivant à Paris intramuros en seraient des utilisateurs, contre 40% des Français vivant dans des communes isolées hors influence des pôles.
VEDECOM, un expert reconnu de l’acceptabilité du véhicule autonome et des nouvelles solutions de mobilité
Cette monographie est le reflet de l’expertise de VEDECOM dans le domaine de l’acceptabilité des nouvelles solutions de mobilité et notamment du véhicule autonome. Un champ de recherche porté par le Domaine « Nouvelles solutions de mobilité et énergies partagées » de l’Institut. Avec ses 50 collaborateurs de 15 disciplines différentes, il adresse des problématiques qui sont cruciales pour le déploiement des nouvelles solutions de mobilité : facteurs humains, cadre juridique, modèle économique des nouvelles mobilités, analyse de la mobilité humaine… Forts de leurs 45 publications acceptées en un an, ces équipes sont sur tous les fronts où se joue la guerre des mobilités. Ils se sont particulièrement distingués en 2019 : création d’Entropy, première spinoff issue de VEDECOM, publication de deux ouvrages majeurs dans le domaine des mobilités (Piloter le véhicule autonome, de Yann Leriche et Jean-Pierre Orfeuil, sous le pilotage de Mireille Apel-Muller ; Véhicule autonome, qui est responsable ? de Iolande Vingiano-Viricel) ; distinction de la solution VEDETECT au Grand Prix du Salon des Maires ; implication forte dans des projets collaboratifs : le projet européen AutoMate, l’expérimentation Paris-Saclay Autonomous Lab ; création de la première formation certifiante sur les aspects juridiques du véhicule autonome…
La monographie sur l’acceptabilité du véhicule autonome, fruit de cette activité intense, sera suivie en 2020 par un travail similaire mené par VEDECOM au niveau international.
Pour en savoir plus :
Document de la Stratégie nationale pour le Développement du Véhicule Autonome
Synthèses :
Développement des véhicules autonomes. La stratégie française
Orientations stratégiques pour l’action publique